La chasse en enclot connaît un accroissement de popularité énorme depuis quelques temps. Plus besoin d'aller abattre les bêtes chez eux, il suffit de se rendre à une des nombreuses fermes spécialisées qui en importent et en élèvent pour satisfaire le chasseur en quête de diversité, d’émotions nouvelles, de trophées, de prestige et de moindre effort avec un succès garanti. Au Québec, ces établissements ne sont pas soumis à aucun autre règlement que l’obligation de détenir un permis de garde d’animaux sauvages en captivité.
L’amateur peut y tuer à loisir et en tout temps de l’année. Des sangliers jusqu’aux grands félins, ces derniers dégriffés et canines enlevées par mesure de précaution. On lui fournit l’arme de son choix : carabine, fusil, mousquet, arbalète, arc ou même une lance! On doit choisir et payer au préalable la bête désirée, qui est transportée pour être relâchée dans un terrain boisé solidement clôturé, d´où elle ne pourra pas s’échapper. À demi domestiquées, les bêtes chassées en enclos ne craignent pas l’Homme. Pour une touche d’authenticité, on les effraye ou on lance des chiens à leurs trousses.
Payer pour la simili sensation forte de tuer des bêtes simili sauvages dans un simili forêt n’a rien du défi, de l’évasion dans la nature ni de ce que les chasseurs invoquent habituellement comme principales motivations.
Pourtant la formule fait rage, au point de se répandre à un rythme inquiétant dans tout les pays. Les entreprises du Québec sont encore bien modestes en comparaison des " game ranches " américains dont l’inventaire peut compter des milliers d’animaux de plusieurs espèces; indigènes, exotiques, à poils ou à plumes. Certaines permettent aux chasseurs de pousser la paresse jusqu’à se laisser conduire dans un véhicule équipé de fauteuils rembourrés, d’où ils n’auront même pas a se lever pour tuer l’animal. On arrête près de l’endroit où les bêtes sont habituellement alimentées et, lorsqu’elles s´approchent pour recevoir leur nourriture, on leur tir dessus. Aucun talent n’est nécessaire. Dans un ranch du Texas, un homme a tiré deux fois sur une antilope attirée par du maïs, transperçant les intestins, blessant également une patte. Le guide a dû achever la pauvre bête pour mettre fin à ses souffrances.
Depuis près de soixante ans, à la Fête du Travail se déroule à Hegins, en Pennsylvanie, un festival de tir au pigeon à lieu coûtant dans les centaines de dollars. Malgré les pressions des mouvements humanitaires, l’État continue d’autoriser ce massacre. Des milliers et des milliers de pigeons sont tués chaque année. Au signal du chasseur caché derrière sa barricade, un employé démarre une machine qui envoie les oiseaux dans les airs. Ainsi relâchés un après un de leur cage, fortement secoués, certains retombent étourdis au sol; ceux qui parviennent à prendre leur envol, se font canarder. Une vidéo tournée à l’insu des organisateurs montre qu’au moins 28% à 30% des pigeons ne sont que blessés. Des jeunes courent les récupérer pour leur tordre le cou, ou leur arracher la tête.
Selon la HSUS (Humane Society of the United States): dépouillée des prétextes de «poursuite équitable» ou de «plaisir au grand air», la chasse en enclos se réduit à l’élément essentiel de la chasse sportive: Tuer Pour Le Plaisir.
Source:
Feu sur la chasse, Marcel Duquette
Éditions Michel Quintin